Écrire, c’est laisser la mémoire faire son œuvre.
5 Avril 2025
Au douzième kilomètre, la douleur au genou est revenue. J’ai tenté de résister, mais j’ai dû m’arrêter. Mon compagnon m’a lancé : « Courage, courage !»
Ça m’a encouragé, mais j’ai dû ralentir. Au quinzième kilomètre, j’étais sur le point d’abandonner. Les idées noires ont commencé à m’assaillir, à se multiplier :
– Te rends-tu compte de la gravité de la situation ?
– Et si un de tes ligaments était déchiré ?
– Le marathon, mon ami, exige une préparation spéciale !
– Tu crois qu’il suffit de débarquer et de courir ? Allez, laisse tomber !
– Quinze kilomètres, c’est déjà pas mal… Tu as 47 ans, non ?
Et d’autres pensées du même genre me tourmentaient. Mais j’ai fait appel à l’image de mon fils Amine, et à la joie qu’il éprouverait en voyant ma médaille. J’ai décidé de continuer, coûte que coûte.
Au dix-huitième kilomètre, je bougeais à peine. Mes pieds me faisaient souffrir comme si je courais pieds nus, mes jambes étaient presque insensibles, et mes genoux semblaient transpercés d’aiguilles. Il me restait encore quelques kilomètres, et les descentes étaient devenues plus douloureuses que les montées. J’avais l’impression que mes tibias allaient traverser mes cuisses. Je tentais de continuer, mais mon corps ne répondait plus.
Un septuagénaire m’a alors dépassé et m’a dit :
« Tiens bon, mon fils, il ne reste que deux kilomètres. »
Ses mots furent comme une bouffée d’espoir qui m’a poussé à reprendre la course. À mesure que j’approchais de la ligne d’arrivée, j’oubliais la douleur. J’ai franchi le pont et aperçu la dernière montée. Les voix des organisateurs me parvenaient déjà. Je ne sais pas comment j’ai réussi à gravir cette pente. Tout ce dont je me souviens, c’est qu’ensuite, j’ai été porté par les encouragements du public, la douceur de cette fin, la beauté de l’instant et la valeur du défi. J’ai franchi la ligne d’arrivée à pas lourds, mais j’y suis arrivé.